Le débat sur l'efficacité des ratios de Fibonacci est aussi ancien que l'analyse technique elle-même. Ses partisans y voient une carte révélant la structure cachée du marché, tandis que ses détracteurs la qualifient d'astrologie financière, arguant que son succès apparent n'est que le fruit d'un biais de confirmation. Seule une évaluation rigoureuse et objective permet de dépasser les opinions et d'accéder aux faits.
Le backtesting consiste à appliquer un ensemble spécifique de règles de trading à des données historiques de marché afin de déterminer si cette stratégie aurait été rentable par le passé. Pour un outil aussi subjectif que la suite de Fibonacci, ce processus est complexe, mais c'est le seul moyen de répondre à la question cruciale : cette stratégie présente-t-elle réellement un avantage statistique ?
Le défi : surmonter la subjectivité
Contrairement à un indicateur comme le croisement de moyennes mobiles, qui génère un signal clair et objectif facilement automatisable, l'analyse de Fibonacci est par nature subjective. Le choix des points hauts et bas est sujet à interprétation ; deux traders peuvent donc analyser le même graphique et en tirer des conclusions différentes.
Cette subjectivité rend le backtesting automatisé quasi impossible pour la plupart des plateformes. Un backtesting manuel est donc nécessaire, ce qui exige un cadre strict et prédéfini afin d'éliminer toute part de subjectivité dans le processus.
Guide étape par étape pour le backtesting manuel
La réussite d'un backtest repose sur la création d'un plan de trading dont les règles sont si claires et mécaniques qu'il n'y a pas de place pour l'interprétation pendant le test.
Étape 1 : Définir une stratégie de trading objective
Tout d'abord, établissez un ensemble de règles concrètes pour l'entrée, la sortie et la gestion des risques. L'ambiguïté est l'ennemie d'un test valide. Une stratégie bien définie pourrait ressembler à ceci :
Actif et période : EUR/USD, en utilisant le graphique journalier pour la tendance et le graphique de 4 heures pour les signaux.
Filtre de tendance : Sur le graphique journalier, la moyenne mobile exponentielle (EMA) à 50 périodes doit être supérieure à l’EMA à 200 périodes. Seules les positions longues seront prises en compte.
Définition d'un point d'impulsion : Une vague d'impulsion est définie comme un mouvement d'au moins 300 pips entre un plus bas et un plus haut. Un plus bas correspond au point le plus bas de trois bougies, avec un plus bas supérieur de chaque côté.
Signal d'entrée : Ouvrez une position longue si le prix effectue un retracement et atteint la zone comprise entre les niveaux de Fibonacci de 50 % et 61,8 %. Cette entrée n'est valable que si une figure d'avalement haussier se forme dans cette zone sur le graphique en 4 heures.
Stop-Loss : Placez le stop-loss 10 pips en dessous du plus bas du swing qui a mis fin au retracement (Point C).
Objectif de profit : Le premier objectif de profit correspond au plus haut précédent (point B). Le deuxième objectif correspond à l’extension de Fibonacci de 127,2 %.
Étape 2 : Sélectionner les données historiques
Choisissez un marché précis et une période significative de données historiques. Ces données doivent couvrir un large éventail de conditions de marché, incluant les fortes tendances, les marchés baissiers et les phases de consolidation. Une période d'au moins cinq ans est recommandée pour garantir la robustesse de la stratégie.
Étape 3 : Simuler et enregistrer les transactions
À l'aide d'une plateforme graphique avec données historiques, remontez au début de la période sélectionnée. Faites défiler le graphique barre par barre, comme s'il s'agissait d'une période en temps réel. Ne regardez pas la suite. Lorsque les conditions définies à l'étape 1 sont remplies, consignez l'opération dans un tableur comportant les colonnes suivantes :
- Numéro de commerce
- Date d'entrée
- Prix d'entrée
- Prix de stop-loss
- Objectif(s) de profit
- Risque en pips (Prix d'entrée – Prix stop-loss)
- Récompense en pips (Objectif de profit – Prix d'entrée)
- Rapport risque/rendement
- Résultat (Victoire/Défaite)
- Profit/Perte en pips
Répétez ce processus jusqu'à ce qu'un nombre statistiquement significatif de transactions soit enregistré, idéalement 100 ou plus.
Étape 4 : Analyser les indicateurs de performance
Une fois les données collectées, analysez les résultats pour évaluer la viabilité de la stratégie.
Taux de réussite : Le pourcentage de transactions qui se sont avérées rentables.
Ratio risque/rendement moyen (RRR) : Un taux de réussite élevé n’est pas nécessaire si le RRR est favorable. Par exemple, une stratégie avec un taux de réussite de 40 % peut être très rentable si le gain moyen est trois fois supérieur au perdant moyen (RRR de 1:3).
Facteur de profit : calculé en divisant le bénéfice brut par la perte brute. Une valeur supérieure à 1 indique une rentabilité. Une valeur supérieure à 1,5 est généralement considérée comme bonne.
Perte maximale : pourcentage de perte le plus important entre un pic et un creux ultérieur de la valeur de l’action. Cet indicateur mesure l’impact potentiel d’une série de pertes et constitue un facteur clé de la gestion des risques .
Espérance : Ce calcul indique le montant moyen qu'un trader peut espérer gagner ou perdre par transaction.
- Espérance = (Taux de gain x Montant moyen des gains) – (Taux de perte x Montant moyen des pertes)
- Une espérance positive signifie que la stratégie présente un avantage statistique.
Interprétation des résultats et perspectives d’avenir
L'objectif du backtesting n'est pas de prouver l'efficacité universelle de la suite de Fibonacci, mais de déterminer si votre stratégie spécifique, basée sur des règles, est performante sur un marché et un horizon temporel donnés. Certaines études ont montré que les stratégies de Fibonacci de base n'offrent pas de meilleurs résultats qu'un tirage à pile ou face, avec des taux de réussite inférieurs à 50 %. Cependant, un plan bien défini intégrant des facteurs de convergence, tels que les moyennes mobiles ou les oscillateurs de momentum, peut générer une espérance de gain positive.
Si le backtest donne des résultats positifs, la dernière étape avant d'investir de l'argent réel consiste à tester la stratégie en conditions réelles, aussi appelée simulation de marché. Cela implique d'appliquer la stratégie dans une simulation de marché réelle pendant plusieurs semaines ou mois.
Les tests en conditions réelles confirment l'efficacité de la stratégie dans les conditions de marché actuelles et, tout aussi important, que le trader possède la discipline psychologique nécessaire pour exécuter le plan sans déviation. Les tests rétrospectifs transforment un outil subjectif en un système basé sur les données, remplaçant l'espoir par la probabilité.
